Les détenteurs d’un bien immobilier en Espagne savent que la fiscalité immobilière espagnole diffère sensiblement de la fiscalité belge. Parmi les différences -qui pourraient il est vrai disparaitre prochainement si l’on s’en réfère au rapport remis récemment par un groupe d’experts au gouvernement et dont La Libre a fait récemment écho dans ses colonnes-  l’on retiendra notamment la taxation des loyers « privés » ainsi que l’imposition des plus-values immobilières.  Les résidents belges qui sont concernés sont ainsi tenus d’acquitter en Espagne l’impôt sur les loyers de source espagnol qu’ils perçoivent ainsi que l’impôt sur la plus-value obtenue à l’occasion de la vente (ou de la donation) d’un bien immobilier situé en Espagne.

L’on épinglera ici deux modifications législatives qui sont récemment intervenues en Espagne.

La première modification concerne l’impôt sur la plus-value municipale. Rappelons d’abord qu’il s’agit d’un impôt distinct de l’impôt sur la plus-value immobilière. En effet, cet impôt, prélevé par les communes espagnoles, est calculé non pas sur la différence entre la valeur de transmission et la valeur d’acquisition des biens immobiliers comme cela est le cas pour l’impôt sur la plus-value immobilière, mais sur l’augmentation de la valeur cadastrale des (seuls) terrains de nature urbaine. Récemment, la Cour constitutionnelle espagnole a annulé cet impôt local jugeant que sa méthode de calcul allait à l’encontre du principe constitutionnel de capacité économique des contribuables (arrêt n° 182/2021 du 26 octobre 2021). Sachant que cet impôt représente la deuxième source de financement des communes espagnoles, l’on comprend pourquoi le gouvernement a réagi très rapidement en adaptant quelques jours plus tard un « Real Decreto Ley» destiné à répondre aux critiques émises par la Cour constitutionnelle (Real Decreto-ley 26/2021 du 8 novembre 2021). Il est désormais prévu que la base imposable de l’impôt sur la plus-value municipale sera obtenue en multipliant la valeur cadastrale des terrains de nature urbaine par des coefficients correcteurs approuvés par les autorités locales. Mais la grande nouveauté du système réside dans l’adoption d’une nouvelle méthode de calcul alternative qui permet dorénavant aux contribuables d’être imposés sur la plus-value réelle obtenue, indépendamment de la valeur cadastrale du terrain. Ainsi, s’il apparait qu’elle est inférieure à la valeur résultant de l’application de la première méthode, seule la valeur obtenue en application de la méthode alternative sera retenue. Et pour éviter tout nouveau risque d’annulation, le gouvernement espagnol a pris soin de prévoir l’exonération de la plus-value municipale si le contribuable peut démontrer que l’opération n’a dégagé aucune plus-value.

La deuxième réforme législative porte sur la méthode de valorisation des biens immobiliers dans le cadre de l’application des droits d’enregistrement, des droits de succession, des droits de donation et de l’impôt sur le patrimoine. Jusqu’à présent, la valeur minimum des biens immobiliers pouvait être déterminée sur la base de leur valeur cadastrale à laquelle chaque Communauté autonome espagnole appliquait ses propres coefficients. Dans la plupart des cas, le résultat de ce calcul aboutissait à une valeur bien inférieure à la valeur réelle du bien, ce qui constituait un avantage certain pour les héritiers et les donataires en particulier. A partir du 1er janvier 2022, il ne sera désormais plus possible de recourir à cette méthode de calcul générale. Elle sera ainsi remplacée par une méthode de valorisation qui sera basée sur des valeurs de références individualisées et mises à jour annuellement par le Cadastre en fonction des données recueillies dans les actes notariés. Ces valeurs de références seront consultables sur le site du Cadastre espagnol (www1.sedecatastro.gob.es).

Rafaël Alvarez Campa

Rafael.AlvarezCampa@everest-law.eu

Avocat associé Everest Law